THÉÂTRE  DE  MARIONNETTES
 
 

LA MÈRE GIGOGNE. — Non, non, pas avant que je t'aie vu à l'œuvre !


POLICHINELLE. — Eh bien, morbleu ! je m'y mets tout de suite !


LA MÈRE GIGOGNE. — Allons, j'ai réussi. Bravo, Polichinelle ! Tu verras, tu t'y habitueras, et ensuite tu trouveras ça charmant !


POLICHINELLE. — Attends, attends, je vais le trousser toute la bande en un tour de main ! Je commence par leur donner de la bouillie ! Attends, attends, attends ! (Il met la marmite). Voici la bouillie ; (une pelle) et voici la cuiller ! (Appelant). Hé ! là ! ici, les petits canards ! Venez vite voir papa ! Venez vite ! (Entrent dix poupons). Ah ! qu'ils sont gentils, les petits ! En avant, marche ! Demi-tour à droite ! fixe ! attention ! papa va distribuer la becquée ! Poupon numéro un, ouvrez le bec ! (Trempant la cuiller). Eh bien, polisson, vous ne voulez pas manger ? Attends ! (Il le tape). Mange, mon ami ! Oh ! oh ! il ne bouge plus ! Tant mieux ! sa part sera pour les autres ! — Et toi ? et toi ? et toi ? Ils n'ont pas faim ! (Les tapant). Allons, qu'on obéisse !... Pan ! pan ! pan ! Eh ! eh ! les voilà tous évanouis ! Ils ne m'ennuieront plus ! Je vais les jeter par la fenêtre ! (Comptant et les jetant). Un, deux, trois, etc. — Là, mes petits ratons ! (Entre la mère Gigogne).


LA MÈRE GIGOGNE. — Eh bien ! et mes enfants ?


POLICHINELLE. — Ils viennent de manger. Je les ai envoyés promener ! Je les soigne comme une mère !
(Entre le Chien traînant un poupon).


LA MÈRE GIGOGNE. — Ah ! mon Dieu oui, vous les soignez joliment, monstre ! Mais arrachez donc ce pauvre poupon à cette bête féroce ! (Elle veut s'approcher).


LE CHIEN, sautant après elle. — Ouah ! ouah ! (Elle recule).


POLICHINELLE. — Eh mais, ce chien n'a pas l'air commode ! — Veux-tu lâcher ça ! (Il tape la mère Gigogne).


LA MÈRE GIGOGNE. — Maladroit ! (Le Chien emporte l'enfant). Oh ! oh ! c'est affreux ! (Furieuse). Qu'avez-vous fait des autres, monstre ! vous les avez tués ?


POLICHINELLE. — Je les ai vendus !


LA MÈRE GIGOGNE. — Vendus ! vendus ! Mon Dieu ! je ne les reverrai plus ! — Au moins, en avez-vous retiré un bon prix ?


POLICHINELLE — Je les ai vendus pour rien !


LA MÈRE GIGOGNE. — Pour rien ! ! !


POLICHINELLE. — Oui !


LA MÈRE GIGOGNE. — Oh ! ce sera votre dernier mensonge, je vous en préviens.


POLICHINELLE — Tenez, regardez par la fenêtre, ils sont là !


LA MÈRE GIGOGNE, se penchant. — Ciel !


POLICHINELLE, la tapant. — Parbleu !


LA MÈRE GIGOGNE. — Oh ! oh ! là !


POLICHINELLE. — Vous allez me donner l'argent promis !


LA MÈRE GIGOGNE. — Jamais, scélérat !


POLICHINELLE. — Eh bien, va rejoindre ta famille, je ne veux pas t'en séparer ! (Il la bat).


LA MÈRE GIGOGNE. — Oh ! oh ! oh ! je suis morte !

POLICHINELLE, la jetant. — Va te promener, toi aussi ! Quels tracas le mariage donne ! Me revoilà garçon, heureusement ! (Entrent Niflanguille et le Sorcier).


NIFLANGUILLE. — Nous allons voir, brigand, si nos fusils auront raison de ton maudit bâton ! Tu as tué ta femme ! je la vengerai ! En joue !


POLICHINELLE. — Eh ! relevez vos seringues ! pas de farces !


NIFLANGUILLE. — Feu ! (Le Magicien tombe). Ah ! malheureux que je suis ! j'ai tué mon frère ! (Polichinelle se cache). Eh bien, où est ce monstre ? J'aurai sa vie !


POLICHINELLE, le tapant. — C'est mon avis ! (Il se cache).


NIFLANGUILLE. — Oh ! mais où est-il donc ?


POLICHINELLE, le tapant. — Je ne me cache pas !


NIFLANGUILLE. — Oh ! je vais l'assommer !


POLICHINELLE, le tapant. — Oui !
(Bataille. — Niflanguille est assommé).


NIFLANGUILLE. — Oh ! oh ! oh ! je suis mort !


POLICHINELLE. — Va dans le caveau de famille ! (Il le jette dehors). J'ai triomphé de tous mes ennemis ! (Entrent trois Enfants).


LES ENFANTS. — Vengeons maman ! (Ils battent Polichinelle).


POLICHINELLE. — Eh ! eh ! petits gueux ! voulez-vous me laisser ! (Ils s'en vont).


LE DIABLE. — Brrr ! ! ! Emportons-le !


POLICHINELLE, se sauvant. — Non, non ! pas encore !
?
(Le Diable le poursuit).


 

FIN

 



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