THÉÂTRE  DE  MARIONNETTES
 
 

POIVRE ET TABAC
 


Théâtre et marionnettes pour les petits, par Mme Girardot

1907


PERSONNAGES

LE PAPA DE PIERRETTE. - PIERRETTE. — LA MAMAN DE PIERRETTE.
L'ÉPICIÈRE. — LE BURALISTE. - PIERROT.

ACCESSOIRES

Six poupées. — Simuler dans le fond de la scène deux comptoirs derrière lesquels seront installés l'épicier et le buraliste.


LE PAPA. — Hé ! Pierrette, viens ici, tu vas me faire une commission.

PIERRETTE, accourant. — Oui, papa.

LE PAPA — Voici ma tabatière et deux sous. Tu iras chez le buraliste, tu demanderas deux sous de tabac que tu feras mettre dans la tabatière ; as-tu compris ?

PIERRETTE. — Oui, papa, j'ai bien compris.

LE PAPA. — Dépêche-toi et ne le renverse pas, surtout.

LA MAMAN, entrant. — Tu passeras aussi chez l'épicière m'acheter deux sous de poivre. Allons, fais vite, ne t'amuse pas dans la rue.

PIERRETTE s'en va en sautillant. — Deux sous de tabac, deux sous de poivre ! Ce n'est pas difficile de se rappeler. Maman dit toujours que je fais mal les commissions, nous allons bien voir. Deux sous de tabac ! Deux sous de poivre !... J'ai bien le temps de m'amuser un peu ; allons regarder les boutiques, oh ! pas longtemps !... (Elle se promène de long en large.) Ah ! mon Dieu, je ne songeais plus à ma commission ! Mais, voyons, pourquoi ces quatre sous ?... Papa m'a dit deux sous de tabac... Et maman, qu'est-ce qu'elle m'a dit ?... Je sais, je sais, elle m'a dit d'aller chez l'épicière. (Elle entre chez l'épicière.) Bonjour, Madame ; deux sous de tabac, s'il vous plaît.

L'ÉPICIÈRE. — Je ne vends point de tabac, ma petite fille ; va-t-en chez le buraliste.


PIERRETTE. — C'est vrai, je me trompe ; donnez-moi deux sous de poivre et mettez-le là dedans.

L'ÉPICIÈRE. Comment, tu veux mettre du poivre dans une tabatière ? 

PIERRETTE. — Oui, Madame, papa l'a dit.

L'ÉPICIÈRE. Eh bien, voilà.

PIERRETTE, court au bureau de tabac. Papa m'a bien dit d'apporter aussi du tabac, ça j'en suis sûre. Bonjour, Monsieur ; deux sous de tabac, je vous prie.

(Pierrette rentre à la maison. Elle pose le cornet de tabac à la cuisine et porte la tabatière à son papa.)

LE PAPA. — Enfin, te voilà ! Ce n'est pas trop tôt. Pierrette, tu t'arrêtes aux devantures, tu flânes dans la rue comme les petits polissons ; tu sais bien que je n'aime pas ça. Allons, donne que je prenne une prise de tabac frais. Oh ! oh !... Atchoum ! Atchoum ! Atchoum ! Qu'est-ce qu'on a mis dans ma tabatière ? Oh ! là, là, mon nez !... J'ai du feu dans le nez !... (Il gesticule en se frottant le nez.) Atchoum ! Atchoum ! Du poivre dans ma tabatière ! Ah ! petite polissonne, tu me le paieras !

PIERRETTE. — Mais, papa, tu m'avais dit...

LE PAPA. — Comment, je t'avais dit de faire mettre du poivre à la place de mon tabac ?...

LA MAMAN, entrant, très en colère. Où est-elle, cette Pierrette ? Elle sera fouettée en conséquence. Je viens de mettre du tabac dans ma soupe ; une bonne soupe aux choux qu'il me faudra jeter.

LE PAPA. — Et moi qui viens de priser du poivre ! Atchoum ! Atchoum ! Atchoum !... Cette enfant ne sait pas faire les commissions, elle ne fait attention à rien.

PIERRETTE. — Je ne me suis plus rappelée...

LA MAMAN, qui la fouette. — Tiens, tiens, cela va te faire rappeler une autre fois.

PIERRETTE, pleurant. Maman, maman, je ne recommencerai pas !


PIERROT, accourant. — Ô maman, tu fouettes ma sœur ?

LA MAMAN. — Oui, c'est une étourdie ; elle vient encore de faire les commissions de travers, elle mérite d'être corrigée.

PIERROT. — Ne la fouette plus, va ; si tu veux, j'irai t'en chercher du poivre.

LE PAPA. — Mon garçon, c'est fort gentil de demander grâce pour sa sœur ; mais, vois-tu, Pierrette avait besoin d'une leçon ; c'est une petite tête en l'air qui n'écoute pas assez ce qu'on lui dit. Aujourd'hui, le malheur n'est pas bien grand : la soupe est perdue et, moi, j'ai le nez rouge, mais un autre jour elle pourrait se tromper encore et faire de plus grandes sottises. Va t'amuser Pierrot. (Pierrot sort.)

LA MAMAN. — Je ne veux pas la punir davantage, car je sais qu'elle fera son possible pour se corriger.

PIERRETTE. — Oh ! oui, maman.

LA MAMAN. — Et tu feras bien, car les enfants étourdis sont fort désagréables et peuvent causer de vrais malheurs.



RIDEAU




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