MADEMOISELLE SANS-SOIN
Théâtre et marionnettes pour les petits, par Mme Girardot
1907
domaine public
PERSONNAGES :
JEANNETTE ET SA MAMAN. - MAMAN DE MARCELINE. - MARCELINE
ACCESSOIRES
Quatre poupées. — Une voiture attelée. — Une maison en carton ou simplement une ouverture pratiquée
dans une boîte pour simuler une fenêtre. — Un chapeau fripé.
Un bonnet de nuit.
(Jeannette et sa maman, installées dans la voiture, arrivent devant la maison de Marceline et s'arrêtent.)
JEANNETTE. — Marceline ! Marceline !...
MAMAN DE MARCELINE, paraissant à la fenêtre. — Bonjour Madame, bonjour Jeannette. Vous appelez Marceline, je crois ?
MAMAN DE JEANNETTE. — Oui, Madame ; nous allons jusqu'au village voisin, c'est une jolie promenade pour les enfants, voulez-vous nous permettre d'emmener votre petite fille, j'ai encore une place dans ma voiture ?
MAMAN DE MARCELINE. — Je veux bien, Marceline sera si contente !... Je vais lui dire de mettre son chapeau, elle sera bientôt prête.
(Elle se retire.)
MARCELINE, apparaissant à la fenêtre. — Ma pauvre Jeannette, que je suis donc ennuyée. Impossible de trouver mon chapeau !
MAMAN DE JEANNETTE. — Cherche-le bien vite, nous n'avons pas de temps à perdre, car il est déjà tard.
(Marceline se retire.)
MAMAN DE JEANNETTE. — Voilà une petite fille qui n'a pas d'ordre, elle aura posé son chapeau n'importe où.
MAMAN DE MARCELINE, à la fenêtre. — N'attendez pas plus longtemps, Madame, cette enfant a besoin d'une bonne leçon, elle égare toutes ses affaires.
MAMAN DE JEANNETTE. — Je regrette bien. Allons, ce sera pour une autre fois. Au revoir, Madame. Nous repasserons ici dans une heure, si Marceline a retrouvé son chapeau, elle pourra venir, en voiture, jusque chez moi.
(La voiture part.)
MARCELINE, pleurant. — Je l'avais mis là... hier soir... en... rentrant... de l'école.
MAMAN DE MARCELINE. — Tu l'avais mis là... eh bien, prends-le ! Est-ce que c'était sa place ? Un jour j'ai trouvé ton ombrelle sous ton lit, mademoiselle Sans-Soin... Tu sais pourtant où il faut ranger tes vêtements, tes livres et tes jouets, mais tu préfères les jeter dans tous les coins de la maison. (Marceline cherche partout. — Elle sort et rentre avec son chapeau fripé, écrasé.) Le voilà, maman, le voilà !
MAMAN DE MARCELINE, le prenant. — Il est joli, tu peux le mettre sur ta tête ; où était-il donc ?
MARCELINE. — Sur une chaise.
MAMAN DE MARCELINE, avec un air désolé. — Oh ! sur une chaise ! ... petite désordonnée, tu ne vois donc pas que tu t'es assise dessus ?... Ton amie Jeannette a beaucoup plus d'ordre que toi, sa maman m'a dit qu'elle rangeait fort bien ses affaires. C'est si gentil une petite fille soigneuse ! (Maman posant le chapeau sur la tête de Marceline.) Oh ! cette horreur de chapeau, tout écrasé, tout sali !... pas moyen de sortir avec... et tu sais, je ne peux pas t'en acheter un autre en ce moment. (Elle se penche à la fenêtre.) Voici Jeannette et sa maman qui reviennent.
MARCELINE. — Je voudrais tant me promener en voiture !
MAMAN DE MARCELINE. — Je ne t'en empêche pas, mets ton bonnet de nuit et va les rejoindre.
(Elle sort et rapporte le bonnet de nuit qu'elle met sur la tête de Marceline.)
MARCELINE, pleurant. — Non, non, maman ! Non, non, je ne veux pas sortir avec ce bonnet.
(La voiture s'arrête.)
MAMAN DE JEANNETTE. — Eh bien ! Marceline, es-tu prête ?
MAMAN DE MARCELINE, entraînant celle-ci jusqu'à la fenêtre. — Oui, Madame, voyez donc elle est déjà coiffée.
MAMAN DE JEANNETTE. — Oh ! un bonnet de nuit pour aller en ville ?
MAMAN DE MARCELINE. — C'est tout ce qu'elle mérite. Hier soir elle a posé son chapeau sur une chaise et s'est assise dessus.
MAMAN DE JEANNETTE. — Fi ! la petite sans soin !
JEANNETTE, riant. — Pauvre Marceline, je ne la reconnaissais pas.
MAMAN DE JEANNETTE. — J'espère qu'une autre fois elle mettra mieux ses affaires à leur place. Pour aujourd'hui, je vois bien que c'est une promenade manquée, je ne voudrais pas lui faire traverser la ville avec son bonnet de nuit. Au revoir, Madame.
RIDEAU