LE CHAT DE TANTE CLAUDINE
Théâtre et marionnettes pour les petits, par Mme Girardot
1907 - domaine public
PERSONNAGES
TANTE CLAUDINE. - PIERROT. — PIERRETTE. - UN RAMONEUR
ACCESSOIRES
Quatre poupées. — Une table. — Deux chaises.
Un panier contenant un chat ou simplement un gros pompon en laine.
Une pelote de beurre ou de fruits : cerises, fraises, etc.
TANTE CLAUDINE, entrant. — Personne ?... Où sont-ils les petits ?... Moi qui suis si heureuse de venir les embrasser ! Toc, toc !... Hé, Pierrette !... Hé, Pierrot !... Êtes-vous là ?... J'entends Pierrot... Le voilà qui arrive en courant.
PIERROT. — Bonjour, tante Claudine ! (Ils s'embrassent.)
TANTE CLAUDINE. — Bonjour, mon Pierrot. Tu n'amènes donc pas ta petite sœur Pierrette ?
PIERROT. — Elle va venir tout de suite. Elle se débarbouille.
TANTE CLAUDINE. — Ah! très bien ; Pierrette fait sa toilette toute seule c'est une grande fille. Dis-moi, Pierrot, avez-vous été raisonnables, cette semaine ?
PIERROT. — Oui, ma tante. Qu'est-ce que tu nous apportes ?
TANTE CLAUDINE. — Patience, patience, petit curieux ! tu regardes déjà mon panier. Si je n'apportais rien, qui est-ce qui serait bien attrapé ?
PIERROT. — Oh ! tu ne viens jamais nous voir sans apporter quelque chose, tante Claudine !
TANTE CLAUDINE. — C'est vrai, mais je veux qu'on le mérite ; et, si vous aviez été désagréables, si vous aviez fait des misères à votre maman, vous n'auriez rien du tout. Écoute, Pierrot, j'ai une commission à faire en ville, une commission très pressée ; je reviendrai bientôt, fais attention à mon panier, je le laisse sur la table. Surtout que personne n'y touche, tu m'entends bien ! Quand je serai rentrée, je vous montrerai ce qu'il y a dedans. Allons, au revoir. (Elle sort.)
PIERRETTE, entrant. — Elle est arrivée, tante Claudine ?
PIERROT. — Oui. Elle est allée faire une commission ; elle va rentrer tout à l'heure.
PIERRETTE. — Qu'est-ce qu'il y a dans son panier ?
PIERROT. — Je n'en sais rien, elle m'a défendu de l'ouvrir.
PIERRETTE. — Des fruits... un pot de confitures ? ou bien une poupée, elle m'en a promis une. Regardons un peu... Oh ! rien qu'un œil !...
PIERROT. — J'ai promis de ne pas toucher le panier, je te dis.
PIERRETTE. — Nous ne toucherons pas ce qu'il y a dedans ; nous le refermerons bien vite.
PIERROT. — C'est vrai. Attends que j'enlève la ficelle. Mâtin ! il est bien attaché... On dirait qu'il remue... (Un chat leur saute à la figure.)
LE CHAT. — Miaou ! Miaou ! Miaou !... (Ils courent à travers la chambre en criant.)
PIERROT et PIERRETTE. — Oh ! là, là ! Qu'est-ce que nous avons fait !...
PIERRETTE. — Tante Claudine avait un chat dans son panier !... Le voilà parti !... Il a sauté par la fenêtre. Qu'est-ce qu'elle va dire ?
PIERROT, courant. — Minet, minet, viens ici... (Il frappe sur une assiette.) Viens déjeuner, minet !... mimi !... petit mimi !... (Il sort à la poursuite du chat.)
PIERRETTE, pleurant. — Hi, hi, hi ! qu'est-ce que nous allons faire ?... Hi, hi, hi !... Aussi, c'est très mal d'avoir ouvert ce panier, puisqu'on nous l'avait défendu. Madame nous dit bien à l'école que les enfants désobéissants sont toujours punis. Ô ma bonne tante, comme je suis désolée !... La voilà qui revient !... si je me cachais ?... (Elle court de tous côtés.) Et Pierrot qui n'est pas là !...
TANTE CLAUDINE, entrant. — Eh bien, Pierrette, te voilà, ma mignonne ! Viens m'embrasser, tu es fraîche comme une petite rose... Ton frère est donc parti ?... Mais, tu trembles, tu as l'air toute triste. Qu'as-tu donc ?... Ah !... mon panier est ouvert !... Mistigris s'est sauvé !... Polissons d'enfants !... vous avez dénoué la ficelle... j'aurais dû m'y attendre... C'est bon, nous allons voir. (Elle secoue Pierrette.) Est-ce toi qui a ouvert le panier ? ou bien est-ce ton frère ?...
PIERRETTE. — C'est moi, ma tante... Hi, hi, hi !... Pierrot ne voulait pas... Hi, hi, hi !...
TANTE CLAUDINE. — Du moins, tu n'es pas menteuse et tu ne cherches pas à faire punir les autres... C'est égal, je suis bien contrariée. Pierrot est le plus grand, il devait savoir défendre mon panier. Le voici. Arrive, mauvais sujet !
PIERROT. — Ma tante... je chercherai le chat... Je vous promets de le retrouver. Ne fouettez pas ma petite sœur... C'est moi... hi, hi, hi !...
TANTE CLAUDINE. — Allons bon ! Il dit que c'est lui, à présent. Oui, je sais que vous vous aimez bien tous les deux et que vous ne voulez pas vous dénoncer ; mais c'est égal, vous êtes curieux et désobéissants, je remporte les gâteaux que j'avais achetés pour la dînette.
UNE VOIX, chantant dans la rue. — Ah ! ramouna la chemina du haut en bas !
(On sonne à la porte. Tante Claudine se penche à la fenêtre.)
TANTE CLAUDINE. — Qu'est-ce que vous voulez, ramoneur ? La cheminée n'est pas sale.
LE RAMONEUR. — Bonjour, ma bonne dame ! Est-ce à vous ce petit chat que j'ai trouvé dans la rue ? Un chien voulait le dévorer...
TANTE CLAUDINE. — Ah! mon Dieu, voilà Mistigris !... Mais oui, mon garçon, monte vite. Comme je te remercie !... (Le ramoneur entre tenant le chat.) Bon petit ramoneur ! (Elle l'embrasse.) On m'a donné ce joli chat ce matin et j'y tiens beaucoup, car il y a des rats dans mon grenier. Ces deux polissons l'avaient fait sauver ; j'étais en train de les gronder quand nous t'avons entendu. Tu vas t'asseoir, petit ; j'ai du beurre frais et des cerises, nous allons faire la dînette... mes premières cerises que j'apportais pour ces garnements... Il ne les ont pas méritées... Eh bien ! mangeons-les sans eux.
LE RAMONEUR. — Ô Madame, je vous en prie, ne mangeons pas tout !... Ils ne recommenceront plus ces pauvres enfant !... Puisque votre chat est retrouvé !
TANTE CLAUDINE. — Allons, je veux bien encore pardonner cette fois-ci. Venez m'embrasser. Quelque chose m'a fait plaisir, malgré tout : c'est que vous n'êtes pas méchants et que vous m'avez dit la vérité. (Elle les embrasse.) Nous ferons tous quatre la dînette et nous inviterons Mistigris qui doit avoir faim.
RIDEAU