THÉÂTRE  DE  MARIONNETTES
 
 

LA BOURSE


Théâtre et marionnettes pour les petits, par Mme Girardot

1907

pièce de theatre marionnettes libre de droits Mme Girardot

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5568467w.r=Th%C3%A9%C3%A2tre+et+marionnettes+pour+les+petits%2C+par+Mme+Girardot.langFR


PERSONNAGES

PIERRETTE - JEANNETTE - PETIT-JEAN - UN OUVRIER

ACCESSOIRES
Quatre poupées. — Un petit tas de sable. — Un moule à fromages. — Une bourse.

 


PIERRETTE, seule, se promenant sur la scène. — Là ! j'ai fini mon ouvrage et maman me permet de sortir ; je vais aller voir si Jeannette et Petit-Jean sont au square. J'ai envie de jouer à la marchande de fromages, c'est très amusant : on fait des fromages avec du sable, et puis les autres viennent les acheter en payant avec des cailloux. (Elle sort.)


(Jeannette et Petit-Jean sont assis sur un banc.)


PIERRETTE arrive en courant ; elle bat des mains. — Quelle chance ! Je vous cherchais... Nous allons jouer à la marchande de fromages.


PETIT-JEAN, se levant. — C'est ça ! moi, je les achète.


JEANNETTE. — Moi aussi, je vais être la dame qui vient faire son marché. (Elle se promène, salue et gesticule. Voix flûtée :) Bonjour, Madame. Avez-vous de bons fromages, aujourd'hui ? C'est qu'il m'en faut de très bons, j'ai du monde à déjeuner, oui, Madame, et du monde que je veux régaler. Voyons un peu ces fromages. (Elle se baisse et se relève vivement.) Hum ! pas fameux celui-là...


PETIT-JEAN. — Ah ! ah ! ah ! ce sera très drôle. Pierrette sera la marchande. Allons, Pierrette, fais tes fromages.


PIERRETTE. — Si nous avions seulement deux sous pour acheter un moule neuf ! en voilà un qui est bien abîmé.


JEANNETTE. — Tant pis, à l'ouvrage ! Petit-Jean et moi nous irons chercher des cailloux chacun de notre côté.

(Ils s'en vont.)


PETIT-JEAN, seul. —Il faut que j'en ramasse une pleine poche, bien sûr j'en aurai davantage que Jeannette.


(Il se baisse, se relève à plusieurs reprises.)


UN OUVRIER, s'approchant. — Dites-moi, mon petit ami, vous n'auriez pas trouvé un porte-monnaie, en vous amusant par ici ?


PETIT-JEAN. — Non, Monsieur, je viens d'arriver ; mais, si vous voulez, je vous aiderai à chercher.


OUVRIER. — Je veux bien et je vous remercie, mon enfant. Je traversais le square pour aller à mon ouvrage et sans doute qu'en tirant mon mouchoir de poche j'aurai fait tomber ma bourse. Comme il n'y a encore personne, nous pourrons peut-être la retrouver.


PETIT-JEAN. — J'ai de bons yeux, je vais regarder partout.


OUVRIER. — Il n'y a pas grand chose dans ma vieille bourse, car je ne suis guère riche ; trente sous seulement ; mais avec ces trente sous on peut tout de même acheter du pain et, si je ne la retrouve pas, mes deux pauvres petits se coucheront ce soir sans souper.


PETIT-JEAN. — Oh ! comme ce serait triste !... Moi, j'ai dix sous dans ma tirelire ; je vais vous les donner.


OUVRIER. — Non, non, mon enfant, merci ; vous avez bon cœur, mais je ne demande pas l'aumône. Cherchons encore, cherchons bien.

(Ils cherchent et disparaissent.)


PIERRETTE, seule, se baissant et se relevant. — Tiens, qu'est-ce que c'est que ça ?... Une bourse !... toute pleine de gros sous... Voyons, je sais compter : deux, quatre, six, huit, dix, douze, quatorze, seize, dix-huit, vingt. Et une pièce blanche... une pièce de dix sous. Vingt sous et une pièce de dix sous, cela fait... (Elle réfléchit un moment.) Trente sous !... Oh ! trente sous !... comme on pourrait acheter de jolis moules à fromages !... Oui, mais cette bourse n'est pas à moi, quelqu'un l'a perdue et, si je prenais les sous, je serais une voleuse. Je vais la porter bien vite à maman pour qu'elle cherche la personne qui l'a perdue.


PETIT-JEAN, accourant. — Pierrette, Pierrette, viens nous aider.


PIERRETTE. — Je n'ai pas le temps, je rentre à la maison ; vois donc, j'ai trouvé une bourse.


PETIT-JEAN. — Ah !... donne, donne vite.


PIERRETTE. — Elle n'est pas à toi.


PETIT-JEAN, l'empoignant par le bras et la secouant. — Donne, je te dis...


PIERRETTE. — Non, non, laisse-moi.


PETIT-JEAN. — Allons, Pierrette, ne te fâche pas ; je sais qui a perdu cette bourse, il faut la rendre tout de suite.


PIERRETTE. — Mais, moi, je veux bien la rendre ; où est la personne qui l'a perdue ?


PETIT-JEAN. — Tiens, là-bas, cet homme qui cherche dans le sable ; il n'a que cet argent pour acheter ce soir le dîner de ses enfants.


JEANNETTE, arrivant. — Oui, Pierrette, c'est vrai, je suis passée à côté de lui, si tu voyais comme il est triste, je voulais lui aider à chercher, mais j'ai cru que vous vous disputiez, je suis revenue bien vite.


PIERRETTE. — Ah! le pauvre homme, dépêchons-nous de le consoler. Je cours lui rendre son porte-monnaie... Monsieur ! ne cherchez plus... j'ai trouvé... voilà ! Voilà !


L'OUVRIER. — Oh ! merci, ma chère petite, merci bien. Vous me rendez grand service. Vous êtes, tous trois, de braves enfants, vous ferez le bonheur de vos mamans. Il faut que je me dépêche à présent d'aller travailler. Au revoir, mes petits, je vous remercie encore. (Il s'en va.)


PIERRETTE. — Comme il est content !...


JEANNETTE. — Ça fait plaisir de trouver quelque chose pour le rendre, dis, Pierrette.


PIERRETTE. — Oui, je suis presque aussi contente que lui.


PETIT-JEAN. — Moi aussi. Jouons maintenant à la marchande de fromages.


PIERRETTE. — Je n'ai point fait de fromages.


JEANNETTE. — Et moi, je n'ai pas ramassé de cailloux.


PETIT-JEAN. — Alors ce sera pour une autre fois, car il est déjà tard.


PIERRETTE. — Oui, rentrons chez nous. Je vais raconter à maman l'histoire de la bourse, et je suis sûre qu'elle m'embrassera.


PETIT-JEAN, frappant dans ses mains. — C'est ça, allons raconter à nos mamans. (Ils s'en vont en courant.)



RIDEAU




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